Revenge porn :

violence psychologique et/ou viol de l'intimité ?

1.-Le "revenge porn" (ou "porno-diffusion") est incriminé aux articles 226-1 et 226-2-1 du Code pénal et se trouve encore assez faiblement réprimé par la loi pénale :  

"Lorsque les délits prévus aux articles 226-1 et 226-2 portent sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel prises dans un lieu public ou privé, les peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et à 60 000 € d'amende.

Est puni des mêmes peines le fait, en l'absence d'accord de la personne pour la diffusion, de porter à la connaissance du public ou d'un tiers tout enregistrement ou tout document portant sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel, obtenu, avec le consentement exprès ou présumé de la personne ou par elle-même, à l'aide de l'un des actes prévus à l'article 226-1.

2.- Il convient néanmoins de noter que les juges du fond peuvent qualifier ces faits, relevant aussi du harcèlement numérique, en violences psychologiques et retenir une peine correspondant aux préjudices lourds. Cette méthode de requalification permet de "déplafonner" la répression pénale de faits parfois très graves. 

 

Ainsi, et en l'espèce, la cour d'appel de Paris, a condamné le prévenu - primodéliquant -  à la peine de 30 mois d'emprisonnement dont 18 assortis d'un sursis mise à l'épreuve (CA PARIS 23 mai 2019). Les faits étaient d'une particulière gravité :  

 " Considérant que le prévenu est par ailleurs prévenu de violences psychologiques, suivies d’incapacité supérieure à 8 jours commises sur la victime et de diffusion des documents portant atteinte à l’intimité de la vie privée, en l’espèce en diffusant à des collègues de travail de la victime, les images de cette dernière dénudée ; que la victime e exposé aux policiers avoir été victime d’atteintes à son intégrité morale et sa réputation sexuelle, auprès de ses amis mais également ses collègues de travail, car le harceleur créait de faux profits facebook et d’application de rencontre et ajoutait ses contacts avant de diffuser des photographies de lui à caractère pornographique à ses proches, ses collègues, des membres de sa famille ; qu’examiné aux UMJ, la victime se plaignait de troubles de sommeil avec insomnie, une prise de poids, de sentiments de tristesse et de fatigue ainsi d’une anxiété importante avec des ruminations à prédominance nocturne, une peut en rentrant au domicile d’être attendu, des conduites d’évitement, d’hypervigilance, de répercussions professionnelles importantes, d’un arrêt de ses activités de loisirs liés à une perte d’envie , d’une dégradation de ses interactions sociales et indiquait avoir eu des idées noires fluctuantes sans velléité de passage à l’acte ; qu’au con stat de ces lésions psychologiques l’UMJ évaluait son incapacité totale de travail à 10 jours ; que l’employeur de la victime a décrit un retentissement important des faits sur son travail et sur son attitude notamment des pleurs fréquents, un manque de concentration, précisant que les collègues de travail avaient reçu aussi des photographies à caractères pornographiques représentant la victime, ce qui l’avait décrédibilisé auprès de l’équipe ; que le prévenu n’expliquait pas comment des traces du nouveau téléphone de la victime, qu’il n’était pas censé connaitre, apparaissaient avec des commentaires sexuels ; que selon constat d’huissier dressé le 24 octobre 2014, une des photos publiées sur un des faux profils mentionnait « posté à C... », sachant que le prévenu était domicilié à C... avant d’habiter à Paris, et une capture d’écran montrait que l’opérateur de la personne était Orange, comme celui du dénommé ;

Considérant que ces éléments, à la lumière de ceux qui précèdent sur l’attitude adoptée par le prévenu durant l’enquête, allant jusqu’à effacer l’historique de son Iphone avant sa convocation par la police, ainsi que les données de son ordinateur qui ne seront retrouvées que grâce à l’exploitation d’un service spécialisé, sont de nature à démontrer suffisamment le caractère établi de l’infraction de violences psychologiques ayant entrainé une incapacité supérieure à 8 jours au préjudice de la victime, et de celle de d’utilisation, conservation ou divulgation d’un document ou enregistrement obtenu par une atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui, contrairement à l’appréciation opérée par les premiers juges ; qu’il convient en conséquence d’infirmer le jugement opéré par les premiers juges ; qu’il convient en conséquence d’infirmer le jugement en ce qu’il a relaxé le prévenu pour ces faits et de l’en déclarer coupable ;"

3.- ce courant jurisprudentiel est soutenu, aussi, par la doctrine qui n'hésite pas à voir dans le détournement de "sextos" ou dans le "porn revenge" non pas une simple atteinte à l'intimité, mais un "viol de l'intimité"